
Lors du Conseil Supérieur de l’Education du 8 février, 6 textes sur le « choc des savoirs » ont été présentés.
La FNEC FP-FO a voté contre l’ensemble des textes, comme la grande majorité des membres du CSE.
Cette réforme vise à trier les élèves en organisant des cours de français et de maths par groupes de niveaux et en conditionnant l’accès direct au lycée par la mise en place de prépas lycées 2nde en Lycée Générale Technologique ou Lycée Pro.
Ce projet va maltraiter une génération entière de collégiens. Sortir les élèves du groupe, supprimer les classes, confronter les enfants à un changement perpétuel de camarades est source de mal-être, comme c’est le cas pour les lycéens suite à la réforme du lycée. Ce tri des élèves en organisant les cours de mathématiques et de français en groupes de niveaux va évidemment accroître les inégalités.
Créer ces groupes de niveau est en soi catastrophiques. Couplé avec les moyens qui manquent partout, cela entraîne des effectifs toujours plus chargés dans les classes et dans les groupes. La prétendue souplesse par établissement pour mettre en place cette réforme dont personne ne veut n’est qu’une manière de laisser la responsabilité de la gestion de la pénurie aux chefs d’établissement.
En même temps, ce décret maltraite les enseignants :
- les enseignants de technologie traités avec mépris, leur discipline étant supprimée en 6ème l’année dernière pour la remplacer par le dispositif de soutien et d’approfondissement voué à disparaître l’an prochain pour créer des groupes de niveaux. La suppression totale de cette heure d’enseignement faisant passer de 26 à 25h d’enseignement en 6ème est inacceptable ;
- les enseignants de lettres classiques qui voient encore leur volume hebdomadaire réduire d’une heure en 4ème et en 3ème
- les enseignants d’arts plastiques, de musique, de LV2 dont les disciplines en particulier deviennent des variables d’ajustement (afin de rentrer dans les heures, ces matières pourraient passer en option… modalités à suivre) ;
- les enseignants de SVT, de physique, de technologie encore eux, qui voient les derniers dédoublements supprimés, ce qui empêche toute manipulation ;
- les enseignants de mathématiques et de français, évidemment, privés d’enseigner à des classes, d’enseigner à des élèves qu’ils connaissent vraiment, privés de leur liberté pédagogique et privés d’être professeur principal dans des conditions correctes.
L’ensemble des enseignants va subir la désorganisation du collège avec des emplois du temps catastrophiques, et des effectifs dans les classes qui ne font qu’augmenter.
Et pour l’ensemble des personnels, en particulier les vies scolaires, les conditions de travail vont encore être dégradées par l’augmentation des conflits et du mal-être des élèves qu’ils devront recueillir.
En outre, dans certains départements, des pressions s’exercent déjà sur les Professeurs des écoles, notamment de CM2, pour faire les groupes de niveaux en français et en mathématiques qui serviront en 6ème ! Inacceptable !
Conséquences du « choc des savoirs » sur les classes de SEGPA
Comme pour l’enseignement général, les élèves de SEGPA perdent une heure d’enseignement en 6ème et deux heures de soutien sont possibles, là aussi, rémunérées en HSE ou en « pacte ».
Le texte évoque également des groupes pour l’enseignement de mathématiques et de français alors qu’aucun moyen n’a été attribué pour dédoubler les classes, pire, les moyens en SEGPA ne font que diminuer, avec la multiplication du regroupement des classes à double niveau, le manque de moyens pour permettre les dédoublements en ateliers, …
Dans certains collèges les élèves SEGPA sont intégrés dans les groupes des élèves les plus en difficulté.
C’est la remise en cause des classes SEGPA.
Les modalités du redoublement
Le texte sur le redoublement ne permettra pas aux élèves fragiles d’acquérir les savoirs qui leur seront nécessaires pour réussir leur scolarité. Le décret ne permet pas d’atteindre cet objectif. Pour pouvoir décider un redoublement, il faudra respecter une procédure très lourde, chronophage et dissuasive tant pour les équipes pédagogiques que pour les élèves.
– Les élèves devront avoir participé aux actions pédagogiques du programme personnalisé de
réussite éducative (PPRE).
– Le texte précise : « Ces actions, avec l’accord des responsables légaux, et sur la base du volontariat
des professeurs, peuvent prendre la forme de stages de réussite organisés lors des vacances
scolaires dans la limite de trois semaines par an ».
– Des rencontres avec les responsables légaux avant la fin du second trimestre (premier semestre).
Les commissions d’appel resteront en vigueur. L’article L311-7 du code de l’Education disposant que « le redoublement ne peut être qu’exceptionnel » ne sera pas abrogé. Au final, il n’y aura pas plus de redoublements mais on fera assumer la responsabilité de faire passer des élèves qui n’ont pas le niveau aux professeurs qui n’auront pas voulu/pu mettre en place les contraintes non statutaires.
La classe prépa pour les élèves recalés du Brevet
Le dispositif destiné aux élèves qui n’auront pas obtenu le DNB en fin de 3ème est présenté comme facultatif pour l’année 2024 2025 et 150 Emplois Temps Plein sont prévus afin de permettre l’ouverture d’une classe préparatoire à la seconde par département. Aucune visibilité n’est donnée sur les moyens attribués à partir de 2025-2026, mais il est déjà prévu qu’il n’y aura pas de telle classe dans chaque lycée.
Les élèves n’accepteront pas de parcourir des distances importantes pour suivre une telle formation. Cette mesure risque donc d’augmenter la déscolarisation des élèves qui étaient auparavant majoritairement scolarisés dans les lycées professionnels et va les livrer à l’apprentissage pour répondre à la demande du patronat.
A la fin de leur année, les élèves n’auront pas l’obligation de repasser le DNB. Ils se verront délivrer une attestation de fin de cycle préparatoire à la classe de seconde.
Labellisation des manuels scolaires
La notion même de labellisation est contraire à la liberté pédagogique des enseignants à laquelle FO est très attachée.
Le projet de décret relatif à la labellisation des manuels scolaires est une injure aux enseignants en laissant entendre qu’ils ne sont pas capables de juger de la conformité d’un manuel scolaire avec les programmes d’enseignement et sa qualité pédagogique et didactique.
Les éditeurs n’imprimeront plus que des manuels labellisés pour être sûrs de pouvoir les vendre. C’est donc une censure économique que le ministère cherche à mettre en place aujourd’hui.
Certes, chacun a pu relever à un moment ou à un autre des erreurs dans les manuels, ou des exercices impossibles à faire. Ces maladresses sont très souvent dues à la durée beaucoup trop courte entre la publication des programmes et leur mise en application dans les classes. Mais ce problème n’est absolument pas pris en compte par le texte présenté par le ministère.